Depuis l’événement tragique qui avait frappé la famille Enki, Ea n’avait réussi à trouver de place dans aucune équipe Genin. Parfois les parents refusaient de voir leur enfant rangé dans la même équipe qu’un « meurtrier » mais il arrivait que des Junin refusent également de l’entraîner. Ce qu’on ne pouvait pas leur reprocher, c’était d’être des hypocrites, ils avaient été parfaitement francs. Ea n’était pas désiré, et pourtant, il allait bien falloir le mettre sous la responsabilité de quelqu’un, où les choses iraient de mal en pis. Le Tsuchikage chercha une solution qui permettrait de ravir tout le monde, et même s’il avait longuement hésité à le placer tout de même dans une équipe, il trouva finalement quelqu’un, semble-t-il, prêt à s’occuper d’Ea. Ce dernier ne connaissait alors son futur Sensei ni de nom ni de visage, il avait seulement compris que c’était une femme.

Une rencontre fut organisée et Ea en était là, à attendre cette fameuse femme. Assis quelque part sur le terrain d’entraînement qu’il connaissait si bien, il attendait. Ea était du genre toujours en avance, et de ce fait, il avait déjà observé bien des choses. C’était presque s’il ne connaissait pas l’exact position des oiseaux dans les arbres, qui depuis des heures chantaient sans repos. Le Genin ignorait de quelle espèce étaient ces oiseaux, mais il avait tenté de les imaginer en en dessinant un au sol, à l’aide d’un long et fin bout de bois, certainement tombé d’un des nombreux arbres. D’où il était, il pouvait voir le toit de sa maison, au milieu d’un nombre indéfini d’autres habitats. Il imaginait alors sa mère, à l’intérieur, se levant probablement, ou pas. Cette courte pensée pour sa mère lui rappela que son Sensei allait être une femme, et à quel point il en était heureux, lui qui avait si peu confiance envers les hommes. Alors, Ea commença finalement à s’impatienter. Il n’était pourtant pas l’heure que la dame inconnue arrive, mais l’enfant n’aimait pas rester les bras croisés, inactif. Dans ce genre de moment-là, à défaut de ne pas faire travailler son corps, il occupait énormément son cerveau. Constamment à la recherche de nouvelles ambitions, le petit garçon cherchait constamment une manière d’acquérir de la puissance, de la force, du pouvoir… dans l’unique intention de rendre son père fier, pour qu’il arrête de le traiter comme un moins que rien. Mais justement, être entraîné par un Junin allait être une parfaite occasion d’acquérir ce pour quoi il vivait.

Son père lui disait souvent, et c’est cela qui le motivait le plus, « Fait hommage à tes ancêtres, rend leur honneur, et fait reconnaître le nom d’Enki à travers le monde. ». Ea l’avait d’abord entendu comme un ordre, et une certaine partie de lui restait bloquée sur cette idée. Mais cet ordre, s’il en était un, sonnait de jour en jour plus beau que la veille. Faire reconnaître le nom d’Enki à travers le monde, n’est-ce pas là une noble tâche ? S’en était en tout cas l’idée que s’en était fait Ea, qui aujourd’hui encore pourchassait cette ambition.

Et alors que, mélancolique, il décida d’arrêter d’attendre pour se rendre sur la tombe de son frère, une belle voix de femme se laissa entendre derrière lui.

D’une simple voix, Ea en voyait désormais le corps entier. Des pieds à la tête, ce que l’enfant remarqua en premier fut l’imposante poitrine de son Sensei. Dès lors, il regardait la femme d’un regard très timide et hésitant. Mais il finit par réussir à dépasser les deux jumeaux pour regarder le fin visage de la dame. Comme il l’avait imaginé, c’était vraiment une belle femme. Et son sourire, son sourire mettait Ea en confiance en l’espace de quelques secondes. Alors, la Juunin se mit à la hauteur du Genin et ajouta quelques détails au dessin du garçon. Ce dernier la regardait faire de ses gros yeux rouge, un léger mais sincère sourire aux lèvres. À ce moment, il aurait aimé posséder un jutsu lui permettant de donner vie à cet oiseau. Là était bien la preuve qu’il n’était pas assez puissant. Mais à l’heure actuelle, il ne s’en souciait plus. La femme se présenta finalement sous le nom de Byakko Ayase. Elle avait dû en voir des missions, des dangers, avec toutes ses années de service, se disait Ea.

- O…Oui… Je serai très heureux d’être votre élève, Sensei. Avez-vous d’autres élèves ? L’on m’avait dit que personne ne voulait de moi. Je suis si heureux d’être tombé sur quelqu’un qui a l’air si formidable. Termina-t-il d’un sourire toujours plus grand.

Ea s’était finalement relevé, après une bonne heure à rester assis. Il essuya la terre qu’il pouvait avoir sur les fesses et salua comme il fallait son nouveau Sensei en courbant son buste vers le sol. Son seul Sensei jusqu’ici avait été son père, qui lui avait interdit l’usage du sabre dès ses dix ans, pour qu’il se concentre sur le Ninjutsu. Mais Ea aimait la polyvalence, et surtout le corps-à-corps. Alors malgré l’importance qu’il donnait au Ninjutsu, Ea ne laissait pas pour autant le Taijutsu de côté. Et un jour, il l’avait prévu, il se remettrait au Kenjutsu. Un œil hésitant tombait encore par moment jusqu’à la poitrine imposante d’Ayase.

- Je suis… pressé, de recevoir vos précieux enseignements, répliqua-t-il d’une voix convaincante.

Il était vrai qu’Ea n’avait pas de nombreux sujets de conversation. Il avait été forcé depuis tout jeune à passer son temps à s’entraîner. Il ne connaissait pas grand-chose d’autre. Il n’avait pas de passion, si ce n’était le combat, n’avait pas spécialement d’ami et n’était pas tellement bavard. Il avait eu une « petite copine » d’enfance, mais l’avait quittée lorsqu’elle l’avait vaincue. Ea était d’ailleurs convaincu qu’il prendrait un jour sa revanche, et il n’attendait que ça. Tout, absolument tout, l’influençait à s’entraîner comme un forcené. Et il attendait de cette Juunin qu’elle le fasse travailler encore plus dur.