Naître à Kiri ne rend pas la vie facile. Cela n’a jamais été le cas. Et ce ne le sera probablement jamais. Pourtant, jamais Koga n'aurait souhaité naître dans un autre endroit, sans nul doute plus paisible et reposant. Non. Il fallait que ce soit ici. Car c'est ici que pendant des années la terreur a régné dans le Pays de l'Eau. Sous la férule de Yagura, le village ninja de Kiri était un lieu de sang et de violence. D'aucuns le surnommaient Village de la Brume Sanglante à cause des "jeux" qui y étaient organisés. Cependant, malgré tout ce qu'on puisse en dire, cette période là n'est pas la pire que le village ait vécu. Au contraire, certains ont vu cette période comme le moyen de devenir plus forts, plus puissants. Comme la famille Muramasu. La grandeur naît dans l'adversité. Voilà une devise qui aurait pu être leur. Force. Courage. Gloire. Pouvoir. Renommée. Voilà ce que les dirigeants de cette famille ont toujours voulu.

Se lever aux aurores. Déjeuner rapidement. S'entrainer. Manger rapidement. S'entrainer. Manger rapidement. S'entrainer. Dormir au maximum 7 heures. Voilà la vie de Koga jusqu'à son adolescence. Charmant n'est-ce pas? Le plus intéressant est à venir. Sisi. Lisez jusqu'au bout vous verrez.

Les guerres ninjas ont toujours été bien vues par sa famille. Le fait de pouvoir s'élever sur le champ de bataille probablement. Il était Koga, le Bien Venu. Il était né pile au bon moment. 8 ans avant la Grande Guerre, à l'époque où le monde commençait à changer. Né pour régner, pour diriger. D'ailleurs, là était le but de sa vie. Succéder à l'un des 7 épéistes de Kiri. Pendant 20 ans, il avait donné toute son énergie à cela, convaincu et désireux de faire resplendir sa famille. Il était prédestiné à ce poste. Au vu de la géopolitique de l'époque, les Epeistes risquaient fortement de changer et leur rang social était des plus enviés. Du moins par les Muramasu. Alors Koga fît de son mieux. Deux longues et rudes décennies de rigueur et d'entrainement aux armes. Pas seulement au sabre. A toutes les armes. Naginata, bâton à trois branches, shurikens, saï, tout y était passé.  Son oncle Kenshiro affirmait qu'un des Sept de Kiri se devait de pouvoir faire face à toute sortes de situations, avec ou sans son épee. Voilà pourquoi tous les Muramasu s'exerçaient à toutes les armes jusqu'à un certain âge. Jusqu'à LA date. Alors Koga s'y était adonné à fond. Tellement que Jinkio Muramasu, son grand-père et chef de famille, décida de lui faire affronter tous les membres du clan jusqu'à ce qu'il réussisse à tous les vaincre. Et il y parvint au bout de ces longues années, terrassant même Daroshi le Colosse, un cousin éloigné réputé comme le meilleur combattant de la famille. La période fatidique se précisa peu à peu. Il fallait maintenant que son entrainement se porte sur le Ninjutsu. Menant sa carrière de ninja en parallèle, il n'avait jamais ressenti le besoin d'employer des jutsus et, comme dans toute sa famille, ce n'était pas le cas. Jusqu'ici, son art du combat lui suffisait amplement. Le drame vint donc plus tard qu'il ne l'aurait du.

Il venait d'avoir vingt ans. Toute la famille au grand complet était réunie pour voir le prodige et lui souhaiter son anniversaire. Mais d'abord, il fallait passer le test de la feuille de chakra dans le but de savoir quelle était son affinité. Le Rituel de Transcendance comme l'appelaient les anciens. Avant ce Rituel, aucun Muramasu n'était en droit d'utiliser son chakra. C'était proscrit. Tous devaient passer par la Voie de l'Ascète, l'entraînement que Koga venait d'achever. C'était supposé être le moment le plus heureux dans la vie d'un Muramasu. Un intense moment de fierté et de bonheur qui amènerait le Muramasu Transcendé à atteindre un rang glorieux dans le village de Kiri et à accomplir de grandes choses.


Il s'était dirigé vers l'autel, fier, souriant. Après le discours solennel du chef de famille, il avait pris la feuille entre ses mains. Tous avaient les yeux rivés sur lui. Chaque personne présente ce jour-là l'avait vu avec cette feuille entre les mains, vêtu du kimono rituel. Il lui fallait juste insuffler du chakra dans le bout de papier. Il avait regardé sans sourciller son grand père et y avait mis toute sa volonté. Cela lui avait semblé durer une éternité. Il se souvenait de chacun des instants de la cérémonie. Le thé noir qu'ils avaient bu tous ensemble avant le début du rituel, les rires échangés pendant celui-ci. Le parfum de ses cousines Jiha et Hamida. Même de l'odeur âpre de la poudre cérémoniale qu'on lui avait étalé sur le front afin d'y dessiner un emblème Muramasu.
Une heure. Il avait tenté pendant une heure de malaxer son chakra sous l'oeil horrifié des chefs de famille. Il n'avait pas de chakra. Du moins, il était totalement incapable de le malaxer. Certains des senseurs Muramasu avaient alors décrété après un long moment de réflexion que, même si le chakra existait en lui, il était totalement impossible de le contrôler. Il n'était qu'un lambda. Il n'était pas digne. Pas apte à devenir un des 7 Epeistes. Sa défaite était totale. Tous ses efforts n'avaient servi à rien et personne n'était plus là pour l'aider. Sa famille venait de lui tourner le dos. Il était le mouton noir. L'échec. Sans Ninjutsu, il ne serait rien de plus qu'un shinobi inutile. Trois jours durant, il fût laissé seul dans la salle rituelle où avait lieu cette étape de la vie des Muramasu. Tous s'entrainaient vingt ans avant de déterminer leur nature de chakra. Pas lui. Il n'était pas apte et personne n'était venu l'aider dans son chagrin. PERSONNE. ABSOLUMENT PERSONNE. Ces trois jours là furent les plus longs de sa vie. Quelque chose se brisa en lui. Comment s'adapter quand tout s'écroule autour de soi? Pfff. Cela peut paraître totalement égoïste ou déplacé mais son monde était réduit à cela depuis sa plus tendre enfance et il venait de voler en morceaux. Impossible de vivre cela calmement pour un humain normal, quel qu'il soit. Alors il avait compris. Personne ne s'en ferait jamais pour lui.


Il avait tout essayé pour se calmer. Il avait hurlé, cogné, s'était cogné. Personne n'était venu. Vous ne comprenez pas? Cette rage le consumait.  Et rien ne pouvait le retenir. Absolument rien. Tout cela était de leur faute. Saloperie d'épéistes. Ils avaient gaché sa vie, ses rêves. Son corps lui faisait défaut là où il ne l'avait jamais trahi auparavant. C'était inadmissible. Il lui fallait des boucs émissaires. Et ils étaient tout trouvés. Les Sept. Oui. C'était entièrement leur faute. Son rire emplit la pièce. Ce n'était pas un rire joyeux, ni même bon. Il était vide de sens. Juste un rire d'amertume, plein de rancoeur. Soixante douze heures venaient de passer et il avait franchi un cap. Ses mouvements se firent plus lents, son souffle moins rauque. Ses tressaillements avaient cessé. Il contenait cette rage en lui petit à petit, il l'acceptait. Nulle envie de reparaître devant les autres ainsi. Il était bien trop fier. Il ne reviendrait que... quand il aurait accompli son devoir. Quand il aurait montré au monde qui il était réellement. Nul être sur terre ne pourrait l'ignorer. Même sans maitriser son chakra, il allait vaincre les Sept. Oui. Il allait leur montrer qu'il était possible de dominer même sans utiliser le chakra.


Jamais sa décision ne lui avait paru saugrenue ou folle. Avec la même volonté que pendant le temps passé à s'entrainer, il s'était mis en route pour assouvir son plan. Quel que soit le temps qu'il lui faudrait, quels que soient les obstacles à franchir, il y arriverait. Pour cela, il allait d'abord falloir trouver une bonne lame.